Abbatiale d'Airvault

Merci aux personnes connaissant la musique de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècle qui nous aideraient à reconnaître des airs non identifiés.

Voir en fin de page

L'orgue à cylindre

Intérêt musical

 A l'intérieur des deux portes qui ferment le meuble sont collés deux tableaux

annonçant le contenu de chaque cylindre.

Les cylindres n°11 et n°12  contiennent des hymnes dont les plus célèbres sont le "Tantum Ergo" et le "Veni Creator".

Quand ils entendent ce dernier air, les auditeurs qui l'ont chanté  dans leurs jeunes années réagissent immédiatement :

"Il y a des erreurs ! Ce n'est pas comme ça !" Ils connaissent en effet la version des moines de Solesmes, or, l'instrument datant de 1830 chante une version antérieure prise dans les livres de chant du Diocèse de Poitiers qui pouvaient offrir des variantes par rapport à celles d'autres diocèses . Voici donc cette version telle qu'elle est notée sur le cylindre. Notez qu'autrefois, l'orgue n'accompagnait pas les chantres mais jouait en alternance avec eux. Si le chant comportait plusieurs couplets, l'orgue commençait seul, puis les chantres interprétaient le second couplet, puis l'orgue jouait le troisième, les chantres le quatrième et ainsi de suite.                                               

                                                     " Veni  Creator Spiritus "                                

 

Sur chacun des deux cylindres 11 et 12 sont notés 10 airs comportant plusieurs couplets.

Un  air  étant sélectionné, le cylindre tourne  sur lui-même autant de fois que le nécessite le chant. Souvent, les notes d'un couplet occupent donc un tour de cylindre.

Il est des cas où, sur un tour de cylindre, on a la musique du premier couplet, et un verset destiné à remplacer le troisième couplet. Ce verset est un très bref morceau d'orgue.

Vous pouvez en entendre un exemple avec l'hymne "Virgo Dei Genitrix" tel qu'il a été interprété par l'ensemble "Vox Cantoris" en alternance avec l'orgue lors du concert du 12 octobre 2013 sur le lien suivant :

 

                                    "Virgo Dei Genitrix" par l'ensemble Vox Cantoris

Le cylindre n°12 propose 4 cantiques en français, la plupart étant des cantiques de communion.

 

"O Saint Autel" est un chant de première communion de Monsigny. Voici les paroles des deux premiers couplets, où le communiant s'adresse à Dieu comme à un fiancé :

 

1. O Saint Autel, qu'environnent les anges, qu'avec transport aujourd'hui je te vois ! Ici mon Dieu, l'objet de mes louanges, m'offre son corps pour la première fois.

 

2. O mon Sauveur, mon trésor et ma vie, époux divin dont mon cœur a fait choix, venez bientôt couronner mon envie, venez à  moi pour la première fois...

 

L'air de ce cantique aurait été emprunté à une chanson de Delafoy (1813) célébrant les roses de Pantin, bien plus belles que celles de Fontenay !

 

1. O Fontenay, qu’embellissent les roses, de tes présents ne sois plus aussi vain, toutes les fleurs, qui chez toi sont écloses, ne valent pas deux roses de Pantin. 

2. Chaulieu lui-même ami des douces choses, quand sous sa treille il chantait le matin, eût oublié sa Claudine et tes roses, s’il eût connu les roses de Pantin...

 

                                                       Voici  la musique commune à ces deux airs

 

 

A propos de cantiques, voici une autre remarque : on entend le même cantique sur l'orgue d'Airvault et sur l'orgue à cylindre de Saint-Chaffrey ; cependant, ce cantique, à Airvault, est dédié à la Vierge sous le titre "Mère de Dieu" alors qu'à Saint-Chaffrey, c'est un cantique royaliste : "Les Bourbons et la Foi"

 

Mère de Dieu, quelle magnificence                            Venez Français, le Dieu dont la puissance
Orne aujourd'hui cet auguste séjour                           Fait triompher et le trône et la foi
C'est en ces lieux que la reconnaissance                  Veut aujourd'hui qu'on chante dans la France
Vient à ses pieds m'enchaîner sans retour                 Gloire au Très Haut! Vive notre bon Roi!
Tendre Marie, o mon bonheur !                                   Vive la France! Vive le Roi!
Toujours chérie, tu vivras dans mon cœur.    
             Toujours en France les Bourbons et la foi.

 

                                                           

                                                  Voici la musique commune à ces deux airs

 

 

Les autres cylindres de la collection sont notés selon le système "à vis" : en même temps qu'ils tournent sur eux-mêmes, ils se déplacent latéralement et les dix tours s'effectuent sans interruption ni manipulation.

 

Ils contiennent  la "Messe pour les Solemnelles Majeures", des proses, des Magnificat à jouer en alternance avec les chantres et des pièces d'orgue pour les différents moments de l'office.

 

Le goût qui admettait alors à l'église la musique d'opéra, la musique de salon ou les airs de danse peut surprendre l'auditeur.

 

Nous avons mis ces airs sur "You Tube" afin que vous puissiez, si vous le voulez bien, nous aider à en identifier l'origine. Ils sont joués sans recherche de registration, simplement de façon à être clairement entendus. Si vous connaissez des personnes très intéressées par  la musique de cette époque, merci de leur transmettre cette demande. Spécifions qu'il ne s'agit pas de musique d'orgue mais de musiques d'origines diverses.

D'avance, merci de votre aide.

 

Ces airs sont enregistrés à un tempo trop rapide avec l'ancienne composition de l'instrument. Cela va être refait rapidement.

  

 

Communion     musique non identifiée

Elévation n° 1  musique non identifiée

Elévation n°2  musique non identifiée

Elévation n°3  musique non identifiée

Elévation n°4  musique non identifiée

 

Entrée de chœur n° 1  musique  identifiée récemment (mars 2020) *

 

Entrée de chœur n°2  musique non identifiée

Entrée de chœur n°3  musique non identifiée

Entrée de chœur n°4  musique non identifiée

* Cette entrée de choeur n°1 vient d'être identifiée par un ami  connaissant bien la chanson française : l'écoute de cette musique l'a amené à chercher dans sa discothèque une chanson révolutionnaire interprétée par Marc Ogeret sur une cassette qu'il avait achetée en 1989 ; le titre en est  "Allons Français au Champ de Mars" Le lien suivant vous permet d'entendre le premier couplet et le refrain tout en lisant les paroles. Il faut attendre le refrain (0'56'') pour entendre la musique que joue l'orgue à cylindre avec l'entrée de chœur n°1.

http://www.histoiredefrance-chansons.com/index.php?param1=MI0507.php

On remarque à l'écoute que la prosodie est malmenée, les paroles collent mal à la mélodie. En haut de la page, on nous signale que le texte  est chanté sur la mélodie de  "Soldats français, chantez Roland". C'était un procédé coutumier à l'époque que d'adapter des paroles révolutionnaires à un air en vogue. Lisons les paroles du refrain sur le document ci-dessous tout en écoutant l'orgue jouer l'entrée n°1

Cette fois, les paroles fonctionnent bien avec la mélodie et on peut penser que ce sont ces paroles que les fidèles se chantaient silencieusement pendant que le clergé se mettait en place pour l'office.

Une chose étonne cependant : le livre ci-dessus nous apprend que ce chant fut composé sous le Premier Empire, et en effet, la pièce fut donnée en 1803. Comment se fait-il que les révolutionnaires en aient emprunté le timbre en 1790 ? Le refrain existait-il auparavant auquel Alexandre Duval aurait ajouté des couplets  à la gloire de Guillaume le Conquérant et Napoléon à la fois ?

En tout cas, lorsqu'on cherche dans "La clé du caveau" qui recueille des centaines de timbres connus en 1850, on trouve la partition correspondant à notre entrée de chœur avec les paroles du refrain "Soldats français, chantez Roland..."

 

mais si on cherche à partir des paroles du premier couplet "Où vont tous ces preux chevaliers...", on nous renvoie au n° 435, une tout autre mélodie de Méhul qui commence par le couplet.

 

Peut-être existait-il une version ancienne à la gloire de Roland, ce qui expliquerait l'utilisation de son timbre en 1790 et une réécriture pour les besoins de sa pièce par Alexandre Duval et Mehul. Si quelqu'un peut éclairer notre lanterne, merci !

Ce que nous retenons pour identifier ces airs notés sur nos cylindres,  c'est qu'il faut chercher dans toutes sortes de musiques en vogue au début du XIXe  siècle.

Le morceau  qui clôt  la Messe pour  les Solennelles   Majeures  sous le nom de  « Sortie »  a été  récemment identifié comme étant une adaptation d'une partie  de l'ouverture  de "Fra Diavolo" de Auber (opéra composé en 1830).

Vous pouvez  écouter la version notée sur l'orgue

                                               

Vous pouvez également  comparer cette musique avec la version originale sur You Tube  (placer le curseur  à 3'21):

                                        

 

Les deux Magnificat qui suivent sont  faits pour être joués en alternance avec les chantres. L'orgue joue les versets pairs, les chantres interprètent les versets impairs. L'orgue ne joue pas les versets tels qu'ils auraient pu être chantés : ils sont remplacés  par de brefs morceaux de musique dont le goût peut surprendre tellement il contraste avec l'esprit  du Magnificat. Là encore, si vous reconnaissez des airs en vogue à cette époque, merci de nous en informer.

 

                                            Suite des versets pairs du Magnificat du 5ème ton

                                                                     (versets non identifiés)

 

 

 

 Ecoutez  le Magnificat du 6ème ton en faux bourdon chanté en alternance par l'ensemble "Vox Cantoris"

                                                              (versets à l'orgue non identifiés)

                                                 

 

 

Les chantres

Le lutrin de l'abbatiale date de la fin du XVIIe siècle. L'aigle, animal royal, repose sur un globe et domine le serpent. Il symbolise Saint Jean l'Evangéliste terrassant le mal et protégeant le monde. Il est posé sur un trépied sculpté représentant la Trinité se terminant par des pattes de lion, animal associé à la résurrection. On y plaçait le graduel, grand livre de musique collectif que lisaient trois ou quatre chantres vêtus de soutanes et surplis, parfois de chapes. Les archives montrent qu'ils étaient soutenus par un ophicléide, ancêtre du tuba, car l'orgue ne les accompagnait pas : l'orgue chantait le premier couplet, les chantres le second et ainsi de suite. Pendant longtemps, les fidèles n'ont pas participé au chant sauf peut-être pour quelques cantiques.

Xavier Bisaro a écrit un livre passionnant sur les chantres en milieu rural. C'est un ouvrage très documenté dont la lecture est tout à fait abordable. Pour en savoir plus sur ce livre, voici un article qui en parle : http://www.musicologie.org/publirem/xavier_bisaro_chanter_toujour.html

et en voici un résumé : https://journals.openedition.org/abpo/2236#text